Si, à la suite d'une erreur de régime vous avez été victime d'un excès de C2H5OH, de lipoïdes, de C12H22O11, de ClNa, d'un trouble de la rotation de la terre, d'un dérèglement de la pesanteur qui en veut à votre équilibre, n'appelez pas police-secours ni le médiateur de la République, ne prenez pas rendez-vous avec un neurologue, un orl, un gastro-entérologue (si, en plus, vous ressentez une pesanteur gastrique, un gargouillis jéjunal et une forte nausée déplaisante). Les difficultés qu'à votre langue à articuler, l'instabilité constatée, vos troubles cognitifs ne traduisent pas, non plus, un empoisonnement foudroyant dû à la toxine botulique ou à l'arsenic mais la conséquence bénigne de l'erreur susmentionnée. Plutôt que d'allonger la file d'attente de l'hopital délabré le plus proche de la table du restaurant responsable de votre triste état, je vous conseille de regagner votre domicile sur un brancard, de vous mettre dans un décubitus relatif qui met votre estomac au dessous de votre glotte afin d'éviter une vidange à contre-courant et, dans le silence, une demi pénombre, vous allez vous laisser aller à une méditation profonde sur les dangers de l'existence, la précarité de la bonne santé, les pièges que tend l'assiette pleine de bonnes choses et le verre rempli par un sommelier complice qui a su abuser vos défenses naturelles. Très vite, si vous suivez mes conseils, vous allez abandonner le Lucullus qui, un instant, a profité d'un moment d'inattention pour s'instroduire à votre place, à table, et redevenir le stoïcien épicurien, modèle de mesure et de sagesse qui fait honneur au genre humain.
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