Un cynique de passage m’a dit :
« Le mal vaut
mieux que le pire, c’est toujours vrai et surtout en politique. Ainsi l’Irak de
monsieur Hussein était une dictature impitoyable où l’ordre régnait par l’effet
conjugué d’une police efficace, d’une armée obéissante, d’une justice partiale
qui assénaient un traitement radical aux récalcitrants grâce à des méthodes expéditives.
Les religions cohabitaient, les ethnies enterraient leur haine, les écoles, les
hôpitaux fonctionnaient. Tout marchait plutôt bien, tant qu’un embargo criminel
n’infligea, aux pauvres irakiens, une peine supplémentaire qui les privait, en
plus de la liberté, des biens essentiels. Le tyran devenu intolérable et accusé
des rares péchés qu’il n’avait pas commis fut défait, déchu, pendu. Au lieu de
la démocratie amenée à la pointe des bombardements, il y a la guerre civile,
religieuse, l’éclatement, le chaos. Ce pays, désuni par origine, est incapable
de vivre ensemble, en démocratie. Il n’y a qu’un Saddam Hussein capable de
faire vivre en paix de tels gens.
En Libye, le scénario
est presque le même. Le dictateur se fait si mal voir qu’il devient
insupportable à son ami d’hier avec qui il faisait pourtant de bonnes affaires.
Celui-ci prend la tête d’une croisade pour apporter aux libyens la concorde, la
justice, la liberté. Le satrape ne résiste pas, s’enfuit, on l’assassine pour
le faire taire. La paix est à peine rétablie que les factions se battent,
veulent le pouvoir, l’argent du pétrole. Ici encore on en revient à rêver aux
jours plutôt tranquilles de la dictature pure et dure de Kadhafi.
En Syrie, la majorité
soumise à la minorité au pouvoir depuis des lustres veut sa revanche, aidée par
l’air du temps. La guerre civile s’installe, terrible. Mais le dictateur de
père en fils n’est pas du genre à abdiquer. Il résiste, impitoyable et ne fait
pas de quartier. Il est aidé par une opposition divisée, déchirée, l’intrusion
d’une entité radicale qui fait peur même à ceux qui voulaient aider à renverser
le dictateur. Ils en viennent à se demander s’il ne faut pas faire marche
arrière, s’il n’est pas le seul capable d’empêcher l’émergence d’une force
incontrôlable qui, au terme d’une anarchie sanglante, imposera un pouvoir qui
fera paraître acceptable un dictateur laïque ».
Et mon cynique de conclure :
« Les guignols
qui gouvernent nos démocraties ont une politique basée sur l’angélisme. Elle ne
tient pas compte de la réalité des pays où ils prétendent imposer leurs idées
parce qu’ils en ignorent tout. Ce sont des idéologues dangereux car ils
aggravent des situations qu’ils n’avaient jamais, avant de se réveiller, essayé
d’infléchir et des apprentis sorciers incapables de reconnaître leur lâcheté
d’avant et leurs erreurs d’après ».
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