Ce blog est pour le lecteur qui apprécie l'ironie, l'humour, qui est à l'affût de pensées faciles, d'idées saugrenues, d'inventions bidon, de conseils bizarres et qui n'est pas horrifié par le sarcasme, l'irrespect. Il est à éviter pour les conformistes, les dominants, les dominés.


vendredi 6 avril 2018

UNE SOIRÉE AU CRAZY HORSE SALOON

Un groupe de séminaristes en fin du premier cycle, soit après deux ans de séminaire, a passé une soirée au Crazy Horse Saloon (Paris) pour tester leur résistance à la concupiscence, à la luxure, à la volupté de la chair fraîche féminine et, ainsi, connaître la qualité de leur continence, la force de leur vocation et l'efficacité des exercices spirituels comme antidote aux fameuses pensées impures, obsession  de tout directeur de conscience responsable.

Le lendemain, rentrés au séminaire, il a demandé à chacun ses impressions. Par dérogation spéciale, nous avons eu connaissance des résultats de l'entretien. L'anonymat de chacun a été respecté.

Q.- "Jean, votre sentiment après cette soirée peu ordinaire."

R. - "J'ai ressenti, dès le début du spectacle un trouble intérieur suivi aussitôt d'un malaise général accompagné d'une sensation de chaleur de tout le corps et d'une tension au niveau temporal en même temps qu'une contracture abdominale. Le tout a été suivi d'un grand moment de faiblesse. J'ai dû quitter la salle et prendre l'air".

Q.- "Et à quoi attribuez-vous ces sensations ?"

R.- "Je pense que j'avais mal supporté le champagne qui nous avait été servi, je l'avais trouvé trop glacé".

Q.- "Merci, Jean, je regrette que ce champagne vous ait gâché la soirée."

Q.- "Luc, alors, cette soirée ?"

R.- "Je n'en ai pas cru mes yeux, La salle était pleine d'étrangers, on n'entendait pas un mot de français. Tout ce monde était très excité, parlait fort, on s'entendait à peine. Le spectacle était dans la salle. Quand il a commencé, le silence s'est fait, il faut le reconnaître, mais toutes ces pauvres filles qui se trémoussaient sans trop savoir où aller, elles faisaient pitié. En plus quasiment nues, elles devaient ne pas avoir chaud, on souffrait pour elles".

Q.- "Très bien, vous avez un œil clinique et critique très affûté".

Q.- "Pierre, qu'avez-vous retenu de cette séance exceptionnelle ? "

R.- "Formidable, un soirée formidable, on était au milieu de frères et de sœurs du monde entier venus communiquer leur enthousiasme d'être ensemble pour célébrer le plaisir de regarder une troupe féminine d'une extrême qualité. Les demoiselles, manifestement très bien préparées, évoluaient sur une scène toute petite avec une discipline d'acier. Elles levaient la jambe avec un entrain communicatif, on sentait qu'elles prenaient beaucoup de plaisir à émerveiller le public, leur dynamisme donnait envie de se remettre au sport. Et puis la musique était au rendez-vous, elle m'a fait penser à du grégorien chanté sur un air de samba. Je ne l'oublierai pas, elle m'a donné des idées pour animer nos rencontres diocésaines.

Ce spectacle, à priori profane m'a fait penser à une liturgie moderne inspirée par un engagement très fort au profil d'un œcuménisme qui laisse augurer une poussée du catholicisme dans cet endroit peu prédestiné".

Q."J'aime votre enthousiasme, il témoigne d'un esprit missionnaire qui vous conduira sans doute dans des endroits difficiles. Quant à vos projets musicaux, il faudra qu'on en reparle.
André alors cette soirée, instructive?"

R.-"J'avoue y avoir été à reculons, comme à une épreuve. On m'avait mis en garde : c'est un endroit mal famé, fréquenté par des individus peu recommandables, certains parlaient de suppôts du diable, de sabbats, enfin un endroit où on perd son âme. Jugez de ma surprise, l'endroit est agréable, on est bien assis, le personnel très serviable, l'ambiance chaleureuse, chacun garde ses distances.

Le Crazy est peut-être une écurie mais très bien fréquentée. Il ressemble plus au paradis qu'à l'enfer. L'exhibition est faite par de véritable athlètes qui mériteraient un endroit moins confiné. Le spectacle n'a rien de licencieux. C'est une troupe acrobatique avec des numéros très rythmés par une musique entraînante. Elles sont peu habillées pour garder une liberté de mouvement que leur imposent des contorsions qui doivent beaucoup éprouver leurs articulations. 

Q.- "Je comprends votre enthousiasme, l'effort physique demande beaucoup de courage".

Q.- "Roland, j'ai eu des échos, ça c'est mal passé".

R.- "Très, pas comme je l'espérais, et j'en garde un souvenir confus. J'avais à peine entamé ma coupe de champagne que tout s'est mis à tourner et je me suis retrouvé par terre. On m'a conduit dans une pièce qu'ils appellent leur salle de dégrisement. J'ai mis du temps à récupérer, mais je me sentais trop faiblard pour retourner dans la salle et j'ai attendu la fin du spectacle en égrenant mon chapelet".

Q.- "Dommage en effet mais je salue votre saine philosophie et votre réaction très édifiante".

Q.- "Mathieu, vous étiez le plus âgé de la troupe, quelle leçon avez-vous tiré de cette expérience ?"

R.- "La première, c'est que décidément je n'aime pas le champagne, je préfère un bon whisky on the rocks, secundo, les petites femmes de Paris sont comme dans mon souvenirs : girondes, certes, mais ils leur manque le petit air angélique qui, seul, pourrait me faire monter au ciel".

Q.- "Rodolphe, et vous, qu'en est-il de cette soirée ?"

R.- "Forte, très forte! Ces filles m'ont subjugué, tétanisé, je n'avais jamais vu ni rien connu d'aussi extraordinaire. Ce groupe est si uni, danse avec une telle cadence, obéit à la musique avec une discipline spartiate, de vraies guerrières et des jumelles à la puissance 10. Vous verriez cette cambrure, cette fermeté des fessiers. Leurs arguments sont clairement affichés, sans hypocrisie et ils ont du répondant! On se croirait dans le jardin d'Éden, avant la croqueuse de pommes. Quelle pureté dans la nudité, quelle innocence.

Ma vraie vocation, je l'ai senti comme une illumination, c'est de les rejoindre, de me fondre dans leur groupe. Depuis hier soir, je me sens un autre homme, je suis prêt à tout changer".

Q.-"Vous êtes très déterminé, je ne vous reconnais pas, je sens que vous allez bientôt nous quitter".

Q.-"Maurice, vous avez été le dernier à quitter les lieux, vos compagnons craignaient de vous avoir perdu, que c'est-il passé ?"

R.-"Un miracle, j'étais bien installé, près de la scène, au deuxième tableau, une certaine miss Paratonnerre, fait son entrée pour un numéro de corde raide effectué à la renverse sur un plateau tournant et en sens inverse -exercice surtout visuel et difficile à expliquer - mais qui mettait très bien en valeur les reliefs de la miss. Si vous imaginez ce que je veux dire. Comme elle passait et repassait devant moi, je n'ai pu que remarquer son nez en trompette et un regard qui lui-même ne me quittait pas de yeux.

Bingo! le souvenir est arrivée comme une fusée à Canaveral, c'était Adèle, ma copine du lycée, un plus que béguin qui nous avait fait fusionner en seconde puis en première et qui avait éclaté pour une stupidité que j'ai toujours regretté. La revoir là, en simple appareil, mais toujours aussi belle m'a fait un choc de l'ordre du cataclysme. Le ciel nous réunissait, le message est clair, le rappel sans appel. Je dois y obéir. Le rideau tombé, je me précipite dans les coulisses, frappe à la bonne loge, elle m'attendait, on se tombe dans les bras. J'ai rendez-vous ce soir avec elle, je vous présente ma démission, je suis fait pour être à ses ordres. Ma vraie vocation est d'être avec elle. Merci de votre compréhension Vous baptiserez notre premier".   

Notre sonorisation du confessionnal n'ayant pu être terminée avant la confession obligatoire du vendredi, nous n'avons pas les informations que nous souhaitions concernant l'état des pensées impures.

Une rumeur court le séminaire. Pour confirmer les résultats du Crazy, une virée chez Michou serait programmée si l'économe dégage les crédits. Seuls les postulants n'ayant pas totalement répondu au test seront invités à cette soirée de rattrapage.
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