Dans mon jeune temps il n'y avait pas que le téléphone qui était immobile. Les charters n'existaient pas, la diligence n'était pas loin. Pour s'évader, il n'y avait que l'imagination et les livres pour la nourrir. Heureusement, pour ceux qui en rêvaient, ils ne manquaient pas. En ouvrir, c'était partir et vivre des aventures, découvrir des pays. L'imagination des auteurs enflammait la nôtre. Plus que nos sinistres enseignants habillés de noir, ils furent nos véritables maîtres. Ils s'appelaient Jules Verne, Jack London, James Oliver Curwood, James Fenimore Cooper, Alexandre Dumas, Hergé, Mark Twain, Robert Louis Stevenson, Rudyard Kipling, On galopait avec Flicka et son fils, on faisait le tour du monde en 80 jours, on était capitaine à 15 ans, on découvrait l'île au trésor, on était le double de Robinson, on ferraillait avec d'Artagnan, on descendait le Mississipi avec Tom Sawyer, on répondait à l'appel de forêt, on allait en Afrique, au Tibet avec Tintin. Croc blanc, Bellou la Fumée, Bagheera, Tarzan, le capitaine Corcoran, le dernier des mohicans, le comte de Monte-Christo étaient nos compagnons de route. Je ne les jamais véritablement abandonnés. Ils ont été et sont restés les plus fidèles de mes amis. Je leur dois d'avoir appris à travailler, à me défendre, à ne pas avoir peur de l'inconnu, du danger, le sens du devoir, la notion du bien et du mal, la liberté de critiquer, la curiosité.
Dans mon vieux temps, j'ai essayé de donner ces livres à des jeunes qui avaient mon âge quand je les ai lus. Ils n'étaient pas intéressés. Leurs héros sont sur les écrans des PlayStations qu'ils regardent avidement. Ils font la guerre, la course à la mort dans le bruit et la fureur avec des êtres monstrueux venus d'un ailleurs qu'ils rêvent d'installer chez eux.
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