Ce blog est pour le lecteur qui apprécie l'ironie, l'humour, qui est à l'affût de pensées faciles, d'idées saugrenues, d'inventions bidon, de conseils bizarres et qui n'est pas horrifié par le sarcasme, l'irrespect. Il est à éviter pour les conformistes, les dominants, les dominés.


jeudi 24 juin 2021

MISE AU POINT

Un discours est actuellement tenu, en France, par des personnes qui se prennent pour des personnalités. Elles déplorent le déclin de l'église catholique, le voient comme une catastrophe et la cause de  l'effondrement de l'identité de notre monde face à la montée d'un islamisme conquérant. Ces gens qui ne sont probablement jamais allés à la messe depuis leur première communion prient pour qu'elle se redresse et sauve notre civilisation. Son existence, comme sa disparition prochaine, seraient donc redevables d'une église et d'une religion auxquelles on devrait tout ce qui a fait l'originalité de notre culture judéo-chrétienne imprégnée de celle gréco-romaine. Avant d'unir nos larmes aux leurs, il faudrait faire le compte de ce que nous devons en réalité à cette église qui se pare depuis le début de toutes les vertus. Derrière la devanture du message évangélique du genre baba-cool se cache une entreprise d'État à la dimension mondiale dont l'emprise sur les corps et les âmes a été rendu possible par sa collusion avec les pouvoirs en place depuis sa nationalisation par Constantin en 325 (Concile de Nicée). Prêchant la tolérance et pratiquant l'intolérance, elle n'a eu de cesse d'étendre son monopole sur notre Occident en détruisant la concurrence et en éradiquant la civilisation grecque et romaine dont on nous dit aujourd'hui qu'elle en fut le héros. 
Il faut se rappeler - cela ne l'est jamais - que l'église catholique a appliqué, dès son origine, la théorie du créationnisme en croyant à la réalité des contes de la bible et gelé pendant plus de mille ans, en occident, tous les progrès de la science. Les chercheurs, les savants dont les idées la contredisaient étaient menacés, condamnés. Les philosophes étaient mis à l'index et leur lecture interdite. Tout l'héritage grec a été ainsi occulté et il fallu attendre il Poggio en 1417 pour que De Rerum Natura revienne à la lumière. Il n'est pas vrai non plus que la valeur notre civilisation, la grandeur de nos arts, notre culture soient dues à cette religion. Elle n'était pas obsessionnelle du beau, du bon mais en faisait des péchés. Les extravagances architecturales que l'on lui doit ne sont que le reflet d'une mégalomanie en contradiction complète avec le message évangélique de simplicité, de pauvreté qui est censé être son credo. Jésus n'a pas demandé que l'or, l'argent, les peintres, les sculpteurs, les musiciens entrent dans la maison de son père. 
Dans une préface de ses admirables annales de l'art, Franco Maria Ricci a parfaitement résumé le message de Renouvier, un philosophe français à qui on doit "Uchronie" et nous pouvons pleurer  avec lui sur les méfaits de cette église qui oublie tous ses vices d'hier et d'aujourd'hui. Voila ce qu'il dit:

« Renouvier publia en 1876 une œuvre qui aurait mérité plus d’audience qu’elle n’en obtint, sous le titre un peu sibyllin d’Uchronie (l’Utopie dans l’histoire), Esquisse historique apocryphe du développement de la civilisation européenne tel qu’il n’a pas été, tel qu’il aurait pu être. C’était l’histoire imaginaire de la façon dont aurait pu se développer la civilisation européenne si l’Empire romain ne s’était pas effondré. Prenant comme point de départ la date de 175 (date également adoptée par Gibbon dans son Décline and Fall of the Roman Empire, et ce n’est pas un hasard), Renouvier imaginait que le sage empereur Marc Aurèle - celui-là même qui ferme ce volume de sa main protectrice et bénissante - avait alors renié son abominable fils Commode pour adopter le génial Avidius Cassius. Il s’ensuivait une enthousiasmante série de réformes que nous appellerions aujourd’hui démocratiques; le christianisme, loin de prévaloir, restait une des nombreuses religions minoritaires; l’Empire se régénérait et résistait aux assauts des Barbares. Bref, tout allait si bien qu’au XVIe siècle d.O. (« des Olympiades », correspondant au VIIIè siècle de notre ère) l’Europe se trouvait dans un état de civilisation supérieur à celui qu’elle connaît aujourd’hui, si déplorable encore sous tant d’aspects. Nous nous serions épargné, en somme, un bon millénaire de Moyen Age et de guerres d’hégémonie. Cette fable positiviste, aussi stimulante que paradoxale, m’est revenue souvent en mémoire alors que je rassemblais et sélectionnais les matériaux destinés à constituer ce volume; et je m’attristais comme si j’avais dû mettre en montre, dans un magasin, les misérables restes d’un épouvantable naufrage. Si le peu qui nous reste est si beau, quel aura été l’immense patrimoine que nous avons perdu ? ».

L'interrogation n'est jamais posée car politiquement incorrecte. Le retard pris n'a jamais été comblé, les esprits formatés n'ont jamais discuté l'hypocrisie du discours et ils continuent d'y voir ce que l'on nous a habitué à croire. Je ne m'associe pas aux pleureurs d'aujourd'hui. Je regrette seulement avec les mânes de Renouvier et FMR que Marc-Aurèle se soit trompé pour notre malheur.

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