Le dernier voyage, du temps de ma jeunesse, avait une autre allure qu'aujourd'hui.C'était le jour de gloire du défunt. Il lui avait fallu attendre d'être mort pour le vivre.
Ce jour-là était le seul et unique où il allait défiler dans les rues, les avenues, les boulevards de sa ville mortuaire, couché dans un cercueil recouvert de brocard, reposant dans un carrosse tiré par des palefrois carapaçonnés. Ils le conduisaient de son dernier logis à sa dernière demeure au son allègre des sabots frappant les pavés. Lui à qui, de son vivant, personne n'avait adressé un salut, voyait les passants s'incliner respectueusement devant le cortège funèbre, signe de déférence, de respect, d'humilité. Derrière la parenté éplorée, de noir vêtue, la foule silencieuse de ses amitiés marchait du même pas cadencé que les équidés. Dans le cimetière, la terre avait été ouverte pour préparer ses entrailles à le digérer...
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