L'avion a tué le voyage. En rétrécissant la distance, en faisant du bout du monde la porte d'à côté, il en a détruit la magie, fait disparaître l'impatience. Avant lui, il fallait attendre longtemps avant d'aborder, de débarquer, d'affronter un monde étranger, étrange, inconnu. Le temps d'y arriver permettait d'en rêver, de l'imaginer, de lire ceux qui l'avaient visité, de se faire une idée de ce que l'on allait découvrir, d'en frémir d'avance. On avait le temps d'apprendre des rudiments de la langue, de s'imprégner de leur histoire, des coutumes. On se donnait au prix d'une navigation au long cours un air de baroudeur, d'explorateur, d'aventurier. Le dépaysement était garanti. Les tour-operators n'existaient pas, pas d'agences Avis pour rent-a-car, de chaînes hôtelières où dormir, de McDo où manger comme chez soi. Les pauvres voyageurs d'aujourd'hui obéissent à l'illusion de moins s'ennuyer une semaine en la passant à 10000 kilomètres de chez eux, pour le temps de 10 heures de vol, en étant pris en charge par des pros du tourisme de masse qui vont leur faire voir ce qui est prévu au programme, un lointain héritage des us et coutumes qui appartiennent à la légende historique et dont il ne reste que la version hollywoodienne.
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