L'homme est un objet bizarre et peu satisfaisant où coexistent de façon conflictuelle deux entités: un corps et un esprit unis temporairement par un bail précaire.
L'esprit reproche au corps d'être trop petit, trop grand, trop gros, trop maigre, laid, fragile, prêt à se fracturer au moindre choc, à tomber malade, à souffrir, à manquer d'équilibre, de force, de vitesse.
Le corps n'est pas en reste et rend l'esprit responsable de tout ce qui l'accable. Il lui reproche surtout sa bêtise incomparable qui le fait vaniteux, jamais content de ce qu'il est et prêt à toutes les folies pour changer de nez, de fesses, de genre, de mode. Il l'accuse de vouloir sa perte en se goinfrant de graisses saturées, salées, sucrées, enrichies de pesticides pour le rendre obèse, diabétique, hypertendu, cancéreux, de boire de l'alcool pour pourrir son foie et son cerveau et d'enfumer ses poumons pour l'empêcher de respirer.
Le corps gémit en silence car il n'a le droit que de rien dire des mauvaises pensées, des réflexions imbéciles, des décisions saugrenues, des idées mortifères, de l'imagination maladive qui agitent l'esprit qui n'aucun souci de la maison qu'il habite.
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