Ce blog est pour le lecteur qui apprécie l'ironie, l'humour, qui est à l'affût de pensées faciles, d'idées saugrenues, d'inventions bidon, de conseils bizarres et qui n'est pas horrifié par le sarcasme, l'irrespect. Il est à éviter pour les conformistes, les dominants, les dominés.


mardi 22 novembre 2022

TYPOLOGIE DES MÉTIERS (SUITE ET FIN)

Le 2 avril 2013, je livrai ici même une typologie des métiers devenue la bible des orienteurs de profession. J'avais mis en attente les métiers de bouche. La profession peinant actuellement à recruter m'a demandé d'en dire tout le bien que j'en pensais, étant sûr que mon  témoignage allait diriger vers eux l'élite de la jeunesse française. 
Le sujet méritait une réflexion approfondie à laquelle j'ai consacré 10 ans de ma vie et ma santé. En attendant les volumes à paraître dans l'Encyclopédie culinaire, je résume mon propos pour vous mettre l'eau à la bouche.
D'abord dire que les métiers de bouche sont les plus beaux, les plus grands car les plus indispensables car vitaux : sans manger on meurt alors que l'on survit très bien sans tous les autres, souvent mieux et je pense aux politiciens, aux énarques, aux moines, aux cardinaux, aux imans, aux rabbins, aux bonnes sœurs, aux footballers, aux scaphandriers, aux souteneurs, aux croupiers, aux barbiers, etc...
Ils ne sont pas égaux devant nos assiettes et j'établis une hiérarchie qui dépend de mon appétit. Je place tout en haut de l'échelle les producteurs, sans eux rien n'est possible et monsieur Gagnaire aurait dû choisir, faute de matières premières, une autre profession.
Nous avons, dans le désordre, les jardiniers, les maraichers, les horticulteurs, les pépiniéristes ( pour les arbres à noyaux et à pépins), les trufficulteurs, les éleveurs de champignons et le champion: le viticulteur qui apport à tous l'ivresse du bonheur. Le propre de ces métiers est qu'il ne faut pas avoir peur de se salir les mains, d'attraper des courbatures. Il faut aimer semer, planter, biner, sarcler, amender bêcher, ratisser couper, greffer, couper, récolter, la nature,  les vers de terre, les abeilles, les bourdons, vivre dehors, avec les saisons, composer avec le froid, le chaud, les gelées, la canicule, la sécheresse, mener un combat constants contre le chiendent, le liseron, le doryphore, le campagnol, le mildiou, la rouille, le puceron, les chenilles, la limace, etc...
À ces héros de la flore, il faut ajouter les ouvriers de la faune qui élèvent les cochons, les poules, les lapins, les bœufs, les veaux, les moutons, les escargots, les abeilles. Je n'oublie pas ceux qui risquent la noyade, se battent avec la houle, les marées, le vent, les vagues : les conchyliculteurs, les pêcheurs d'eau douce ou salée, les paludiers qui nous sale l'assiette. Ils méritent tous notre considération la plus  distinguée.
Au  niveau inférieur, complètement dépendants, on a les transformateurs de la viande, des fruits et des légumes qu'ils ont acheté à Rungis, aux halles centrales, au marché d'intérêt national, à Métro, chez Picard ou  l'épicerie du coin. Je citerai la boucherie-chevaline,  le charcutier-traiteur, le tripier et surtout les  restaurants où officient les meilleurs ouvriers de la France gastronomique à la tête d'escadrons de cordons bleus rêvant tous d'un macarons de chez Michelin.
Le Mozart, l'empereur, le Louis XIV des métiers de bouche est le PATISSIER, naturellement hors concours. Bienfaiteurs de l'humanité gourmande, la seule frange de l'humanité qui ait tout compris, ils tirent de la farine, du sucre, du beurre, des œufs des accords à faire frissonner d'extase les papilles. Ils sont les princes de l'aristocratie du goût.
Cette énumération des principaux métiers de la bouche (le dentiste, le stomatologue, l'implantiste, l'orthodontiste, le prothésiste sont les instrumentistes  nécessaires pour la garder  en état de fonctionner, ils appartiennent donc à nos métiers en question) montre l'immense gisement d'activités qui a le devoir de maintenir en vie la société  en la faisant manger à sa faim. Y a t-il une mission plus belle? Je réponds "Non", à la madame et au monsieur qui allaient me poser la question. Il faut des qualités qu'un politicien, un énarque,  qu'un polytechnicien, qu'un banquier n'a pas. À l'égal du médecin dont il partage les valeur, le candidat à un métier de la bouche doit être altruiste, généreux de son temps, travailleur, opiniâtre, dévoué, infatigable, intransigeant. Manuel, il doit aussi obéir à un code de bonne conduite et réfléchir au meilleur dosage des intrants, à limiter les ingrédients, ne pas abuser des traitements,  calculer, doser, choisir le moment, s'adapter, apprendre sans cesse, ne jamais désespérer et accepter l'ingratitude, les reproches, la calomnie. Ce sont des métiers pour ceux qui aiment les autres, veulent les rendre forts, en bonne santé, et heureux, les plaisirs de la bouche étant les seuls qui se partagent, se renouvellent et attendent le dernier instant pour faiblir.

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