La pertinence est une qualité rare et précieuse. Elle permet d'être au bon endroit au bon moment, de se taire quand on n'a rien à dire, d'agir ni trop tôt ni trop tard, de prendre la décision adéquate, de ne pas commettre d'erreur.
La non-pertinence- rien à voir avec l'impertinence- est son contraire. Provoquée par la bêtise, l'orgueil, l'ambition, la précipitation, elle engendre des catastrophes. Elle remplit l'histoire.
Pour le plaisir de rappeler que la gloire est compatible avec elle, j'en donnerai quelques exemples restés fameux.
Le premier est fondateur et Eve n'aurait pas dû croquer la pomme. Sans cet acte irréfléchi donc non pertinent, nous serions encore au paradis.
Le deuxième est tout autant inexcusable. Dieu le père en expédiant son fils unique sur terre l'envoya à la mort, sachant pertinemment qu'il avait des idées suicidaires.
Les suivants n'eurent pas le même retentissement quoiqu'on en parle encore. On citera
- Louis XVI en s'enfuyant par Varennes, dans un carrosse, n'a pas pris une décision pertinente. En prenant une autre direction, une voiture anonyme, son sort et celui de sa famille, de sa dynastie et même celui de la France eussent été différents et sans doute meilleurs.
- Napoléon, malgré une intelligence indéniable, ne dut qu'à des initiatives non pertinentes (expédition d'Egypte dont il faillit ne pas revenir, conquête de l'Espagne, un pays qui ne parle pas le français, catastrophique traversée de la Bérézina, naufrage dans la sombre plaine de Waterloo) une fin misérable dans un îlot insalubre de l'océan indien, accélérée par la cuisine anglaise .
- Un de ses successeurs, Charles X ne fut pas mieux inspiré en voulant coloniser l'Algérie, un pays plein de rebelles depuis toujours. Il nous eut évité une guerre d'indépendance qui nous cause encore , quoique perdue, bien des soucis.
- Son neveu, le troisième du nom n'eut pas plus de chance avec la pertinence en envoyant l'archiduc Maximilien d'Autriche se faire fusiller au Mexique à défaut de s'y tailler un empire, de déclarer la guerre à Bismarck en 1870 sous la foi d'une fausse dépêche en n'ayant pas l'armée capable de la gagner.
-Les années qui suivirent furent remplies selon des habitudes datant de Vercingétorix d'erreurs stratégiques aux conséquences tragiques, de déclarations intempestives et ridicules, de traités caduques avant même que l'encre soit sèche. Le processus connut son âge d'or avec avec la quatrième république. Un instant calmé durant un moment de grâce, sous la cinquième, il reprit de l'élan sous l'impulsion de fonctionnaires se prenant pour des hommes d'état, d'avocaillons ambitieux voulant étendre à la chose publique leur domaine d'incompétence. La liste de leurs incongruités s'enrichit sans cesse de mesures ineptes, de lois inapplicables, d'arrêts litigieux. Nos dirigeants aussi mal que leurs opposants exposent en permanence leurs inaptitudes à diriger, leur incapacité à gouverner. Armés seulement d'une ambition trop grande pour eux, d'un orgueil proportionnel à leur médiocrité, dénués de toutes les qualités qui doivent être celles d'un homme d'état: clairvoyance, courage, volonté, ils hésitent, avancent, reculent, font du sur place, attendent que le temps fasse leur travail, que les faits imposent leurs conclusions et que leur mandat finisse pour pouvoir toucher leur retraite et jouir des avantages en nature et en liquide que la république accorde aux perdants.
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