Si le monde était logique, si le voyeurisme, l'indiscrétion étaient réellement condamnés par les bonnes mœurs officiellement prévalentes, la lecture des romans devrait être interdite pour outrage à la vie privée. Sous le prétexte fallacieux qu'il s'agit de fiction, elle est autorisée.
Dès la première page le plus souvent, sinon la deuxième, le lecteur est plongé dans l'intimité des personnages du roman et il ne va plus les quitter: il verra de près, vivra même, selon le choix qui lui aura été imposé par la critique ou le libraire avec un enfant martyrisé par ses parents, une fille-mère abandonnée par l'un de ses dix amants d'une nuit, un espion venu du chaud et dérivant sur un cocotier dans les quarantièmes rugissants, la faillite d'un milliardaire enrichi dans le trafic de politiciens, une mère de famille nombreuse enceinte de jumeaux saisie par la grâce lors d'une visite à la Sainte Chapelle et quittant sa gorouée, son mari paraplégique pour aller chanter la gloire du Seigneur au couvent des Ursulines, un soldat de la légion étrangère ayant déserté après avoir refusé de céder aux avances de son adjudant qui avait une mauvaise haleine.
Ces romans nominés pour le Goncourt des EHPAD ne nous épargnent aucune des mauvaises pensées, des réflexions malsaines, des actions condamnables, les conversations intimes enfin tout ce qui emplit une vie digne d'être romancée.
Le roman est donc un attentat à la vie privée de ses protagonistes. Peu importe qu'elle soit virtuelle, née de l'imagination. Le principe de l'inaliénabilité de la vie privée est bafoué. Rien ni personne n'ont le droit de s'en moquer.
Honte (Shame aurait dit Hamlet). Promettez-moi de vous amender, de renoncer à votre curiosité coupable et ne lire désormais que des modes d'emploi, le Chasseur Français, et le blog à Dancharr quand j'y suis.
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