Ce matin , décidé de parler avec quelqu'un de mon âge- il n'y a que des centenaire au village-, je suis allé dans la forêt. J'y avais repéré un chêne de fière allure, de belle lignée, de ma génération. Il était entouré de baliveaux, des jeunes pousses qui confirmaient la verdeur du sujet.
Je m'approchais, les bras ballants,, les mains ouvertes, vides, lui montrant mes intentions pacifiques et que j'avais laissé la tronçonneuse au vestiaire. À 3 mètres de son tronc, je l'apostrophais d'un ton familier mais respectueux comme il se doit entre gens de bonne compagnie et lui demandais selon l'usage comment allait la santé et ce qu'il pensait du temps.
"N'avez-vous pas trop souffert de l'excès d'eau et maintenant de l'extrême chaleur?"
Silence pour toute réponse, pas une de ses feuilles n'avait bruissé.
Je réitérais ma question:
"Cette instabilité climatique ne gène-t-elle pas la montée de la sève?"
Pas de réaction, manifestement je ne l'intéressais pas ou je l'importunais.
Dépité, vexé, je posais mon stéthoscope sur l'écorce pour essayer d'entendre ses pensées secrètes - je suis parfois indiscret-. Aucune pulsation, aucun écho. Dans le chêne, l'aubier n'est pas épais et j'espérais au moins un murmure. Ce néant intérieur de la part d'un chêne en bonne santé, très vert, sans parasites, ni maladies cryptogamiques pouvait surprendre. Depuis que l'on connaît la richesse de la vie spirituelle des arbres et des chênes en particulier, je pouvais m'étonner et m'inquiéter. Étais-je tomber sur le misanthrope de l'espèce, un taiseux ayant fait le vide chez ses amis et muré dans un silence monastique? Nous aurions eu beaucoup de choses à nous dire, étant né la même année . Mais je n'allais pas n'éterniser avec ce vieux bougon. J'allai plus loin, faire causette avec un charme qui était en fait une charmeuse en forme de charmille, pleine de drôlerie, intarissable et qui m'a raconté tous les potins de la forêt.
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