Les bretons qui jouxtent l’Atlantique ont une réputation
légendaire qui rend jaloux les continentaux. Ils envient leur fameuse sagesse.
Ils la doivent au radon, au chouchen, aux bouquets, à l’iode, au goémon. On ne
savait. La raison était simple. C’était tout ça plus la marée. Elle est
exceptionnelle sur la côte bretonne avec une extension au Mont St. Michel. Son
flot, en montant, magnifie leur sagesse. Son reflux la laisse à découvert,
prête à l’emploi. Stimulée, sans arrêt, par ces allers-retours, l’imagination
des bretons s’exagère, s’exaspère, s’envole. Elle en fait des poètes, des
rêveurs, voyageurs. Les vents du ponant leur apportent des histoires
d’ailleurs, les tempêtes leur font voir des mirages, les sirènes des bateaux et
des fonds sous-marins les enchantent. Agités par la mer, éventés par le vent,
lessivés par la pluie, les embruns, l’homme et la femme de la côte, entre terre
et mer, marée haute et basse, les pieds dans le granit, la tête dans les nuées,
le corps dans l’entre-deux, conversent avec le ciel, y parlent à cœur ouvert,
se penchent par dessus bord, se perdent dans le bleu.
Il ne suffit pas d’être un poète bercé par la marée pour
avoir une sagesse digne d’être admirée. Il y a que le breton de la côte croit
ce qu’il voit à la façon d’Épicure, en est très content. Son imagination
exaltée par le mouvement de la mer, la vue du ciel, la caresse du vent, sait
que c’est trop beau pour n’être que vrai. Il s’est inventé, pour comprendre, un
monde encore plus extraordinaire où il retrouve toutes les chimères, les
sirènes, les farfadets qui lui font oublier que la terre est parfois à marée
basse.
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