De notre politologue Jean-Pierre Langue de Bois.
Les résultats ont partout été conformes aux prévisions. Tous
les votants ont déposé leur bulletin dans les urnes, tandis que les
abstentionnistes les ont désertées, en ayant sans doute oublié leur devoir
civique de ce jour-là. Tous les partisans ont été fidèles à leur parti pris et
ont voté, avec unanimité, sans défaillir à leur esprit de suite. Les tenants de
chacune des listes ont respecté, à une écrasante majorité, leur intime conviction
et mis leur bulletin dans l’enveloppe sans subir aucune pression qui aurait pu
les faire changer d’avis au dernier moment. Les scrutateurs ont constaté, à ce
point-là du choix, qu’aucune contestation n’avait été enregistrée. Une nouvelle
preuve que notre démocratie respecte la liberté de conscience dans les
isoloirs.
La majorité requise dès le premier tour a apporté une joie
qui s’est exprimée bruyamment dans un nombre plus important de villes et de
villages que ce à quoi les pessimistes s’attendaient, apportant ainsi la preuve
que le jeu était fait d’avance. Corrélativement, les perdants savourent, dans
l’amertume de la déconfiture, une défaite qu’ils savaient gagnée d’avance, un
miracle est toujours possible dans notre pays de chrétienneté et de fille aînée
de l’église. Mais surtout, rien n’est acquis, soulignait un fin connaisseur des
élections locales qui avait assisté à trop de retournements de veste de
dernière seconde pour s’étonner de résultats inattendus à défaut d’être honnêtes.
On peut dire que ce lendemain d’élections est conforme à
tous les lendemains de fête pour les vainqueurs qui ont une gueule de bois et
de défaite pour les vaincus qui se consolent par des discours en langue de
bois. Le bonheur de ceux-là compensera le malheur de ceux-ci. Mais, comme tout
est relatif et a son versa, une bataille urnale est un jeu à qui perd gagne car
les refusés seront tranquilles, sereins, iront à la pèche, au théâtre, en
voyage, au coin de la cheminée, se promener, lire, voyager tandis que les reçus
hériteront de la secrétaire de mairie, des employés municipaux, de la dette, de
la voirie, des permis de construire, des noces et des banquets à présider, des
commémorations, des accidents de circulation, des mariages, des enterrements et
de tout le temps passé à parler, à discuter, à comploter, à parader, à
s’énerver, à s’emmerder.
Nous attendons avec impatience le second tour de dimanche.
Ce sera encore un jour de réunion citoyenne où chacun sort de sa tour d’ivoire
pou se retrouver autour d’un projet commun à construire pour décider d’un
avenir qui fera de la vie communale un endroit dans le temps et l’espace
convivial, agréable, sympathique. Il faudra s’intéresser aussi aux ambitions
déçues, aux attentes récompensées, aux sentiments sincères, aux émotions
refoulées, aux confirmations, aux confessions, aux mots historiques, aux
mensonges, aux illusions perdues, aux bons battus par des médiocres, aux
voleurs, prévaricateurs réélus sous les applaudissements, aux malins élus par
des idiots, aux irresponsables chargés de responsabilités. Six ans d’aventures
au quotidien pour des gens dont l’esprit d’aventure se borne à celui du
clocher.
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