Ce blog est pour le lecteur qui apprécie l'ironie, l'humour, qui est à l'affût de pensées faciles, d'idées saugrenues, d'inventions bidon, de conseils bizarres et qui n'est pas horrifié par le sarcasme, l'irrespect. Il est à éviter pour les conformistes, les dominants, les dominés.


dimanche 4 février 2018

DÉSORDRE

Le désordre ne mérite pas l’opprobre dont l’ordre l’accable. Si le désordre ne se complaisait pas à confirmer par un aimable masochisme la rumeur ordinale, il pourrait sans même s'en donner la peine remettre l’ordre à sa place ou l’écraser d’un mépris dont il ne se relèverait pas. Mais, ce serait contredire une nature qui se plaît dans un foutoir où il est le seul à reconnaître les siens.

L’ordre est tout sauf innocent et faire le procès de son contraire dégénère très vite, c’est lui qui se retrouve au banc de l’accusé. On peut tout lui reprocher. L’ordre établit la dictature et, avec elle, l’intolérance, la peur, la prison pour presque tous. Il établit des hiérarchies, des classements, des classes, fixe les normes, les étapes, les objectifs, les rappelle sans cesse, ne veut pas qu’on s’en éloigne, même pour un entre nous, un aparté, un cinq à sept, un en-cas, enfin tout ce qui le dérange.

L’ordre, c’est rigide, inflexible. Il veut l’obéissance aveugle, organise l’emploi du temps dans les couvents, dans les casernes, dans tous les lieux où la liberté de penser, de s’amuser, de musarder est interdite. Il rassemble, fait défiler, marcher en cadence, au pas de l’oie, au son du tambour, de l’orgue, au rythme du sergent major.

L’ordre, c’est silence dans le rang, que pas une tête ne dépasse, la division du travail : la haute direction au sommet de l’échelle, les bas- salaires dans les soutes, à la chaîne, à la queue de vaches, l’état major des armées en dernière ligne, la chair à canon  en première.

Ils veulent que l’ordre règne car le temps que l’on perd à ranger, à exécuter, à prier, à le maintenir est gagné par tous les profiteurs de l’ordre. Ils le consacrent à s’amuser, à se reposer, à s’empiffrer, à se goinfrer, à se moquer, à prospérer, à dominer, à se glorifier, à pontifier, à faire pleurer.

Mais leur haine du désordre vient de plus loin, de plus haut: ils ont compris, les féaux de l’ordre établi, que le désordre est l’ENNEMI, le seul qui puisse les empêcher de régner, de dominer. Le désordre, c’est la pagaille (joyeuse), la fantaisie, la gaieté, le plaisir de chercher, la joie de trouver, de folâtrer, de s’égarer, de zigzaguer, de se moquer, de s’éclater, de gamberger. Dans un pays où règne le désordre, l’ordre n’a pas sa place, il ne peut s’y mettre qu’à la force des baïonnettes, au pas de charge, au son du clairon.

Le désordre est à l’ordre ce que la paix est à la guerre, le paradis au purgatoire, la cerise au gâteau, le silence au bruit, le sucré à l’acide. Le désordre est dans l’ordre des choses puisque c’est du chaos que la vie est venue.

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