Le coût du travail devrait être proportionnel au risque encouru,
à la fatigue, à sa difficulté, à sa pénibilité, au service rendu, au besoin
qu’il comble. Il devrait être inversement proportionnel à sa facilité, à son manque
d’intérêt pour la communauté.
Ce simple énoncé montre que la logique n’est pas respectée.
La société marche sur la tête car l’ordre des choses est inversé.
L’échelle des valeurs est fixée par ceux qui en profitent.
Il en est ainsi depuis le début. Le faible est toujours
soumis. C’est une loi de la nature : le loup mange l’agneau, le lion l’antilope,
la mésange l’insecte, le chat la souris. Le guerrier tue le paysan pour lui
voler sa récolte, sa fille. Il devient le propriétaire de la terre, fait de
l’autre son serf, son esclave. Il se sert quand le blé est récolté, l’autre
reste faible, misérable, affamé. L’astuce, la ruse, les belles paroles ont le même
pouvoir dominateur, coercitif. Elles domptent l’esprit, asservissent l’âme,
endorment, domptent. Elles édictent des règles, des commandements, inventent
des croyances, décident des politiques, offrent des perspectives, promettent
l’enfer, le paradis pour ici ou après.
Ceux qui savent la vérité organisent la réalité. Ils
établissent leur hiérarchie. Ils se mettent à sa tête, fixent leur salaire,
décident des autres.
C’est ainsi que la dichotomie du travail a prospéré. Les
plus forts aidés par les plus malins sont les maîtres de la société et les plus
utiles, les indispensables, ceux qui font tourner la machine, travaillent de
leurs mains, bâtissent, construisent, sèment, récoltent, creusent, ramassent,
se fatiguent, sont payés à la pièce, au Smic, mangent à la cantine, font les 3 huit,
voyagent en métro, en bus, en RER, taillables, corvéables, jetables.
Cela dure depuis que les seigneurs de la guerre sont les maîtres
des terres, puis des forges. Patrons du CAC 40, ils ont acheté les banques,
sont les maîtres des politiques qui gouvernent la société. Ce sont toujours les
mêmes qui règnent sur le reste du monde car si tout bouge, rien ne change.
Au sommet, la lutte est féroce et seuls survivent les plus
forts. C’est dans leur nature de s’entretuer car moins ils sont, plus ils ont
pour se régaler. Ils se font aider par les plus malins. Au début ce furent des
bons apôtres. Plus tard et plus nombreux, des bons curés, des évêques, des archevêques,
des cardinaux, des papes. Ils oignaient les seigneurs, s’en faisaient les
prêcheurs, les confesseurs, les professeurs. Ils travaillaient dans le divin.
Pour maintenir la discipline, les rois, les empereurs enrôlaient les
instituteurs, les professeurs, les notaires, les avocats. Pour faire respecter
les frontières, les règles, les règlements, les codes, les feux rouges, que l’impôt
rentre, il y eut la police, la gendarmerie, les inspecteurs, les militaires.
Bien encadrée, la société apprit à marcher au pas, à la cadence
de ceux qui font la loi.
La raison de l’échelle des salaires est clairement affichée.
Les plus riches avec les plus malins sont en haut parce qu’ils sont les plus
forts et, tout en bas, il y a la foule de tous ceux qui ne sont ni l’un ni
l’autre.
Pour inverser la situation qui, on l’a vu est établie par la
force des choses, il faudrait une révolution. Elle aurait la fonction de fixer à
chacun le salaire qu’il mérite. Au plus utile, le salaire le plus élevé, à l’inutile, le moins élevé.
(à suivre)
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