Chers amis, vous vous êtes enfin décidés à nous rendre visite et avez pris vos billets pour l'outre-mer. La traversée de la moitié de l'océan pacifique et celle de l'atlantique ne devraient poser aucun problème. Vous aborderez nos rives enchanteresses détendus et prêts à profiter d'une semaine de charme et de plaisirs.  Je préfère cependant vous avertir à l'avance de ce qui va se passer dès que vous serez à Paris- Charles De Gaulle afin que vous ne soyez pas surpris, la surprise étant en soi désagréable. Vous serez confrontés, comme il va de soi, à quelques  formalités administratives de routine auxquels vous devez être habitués, la règle étant devenue générale, m'a-t-on dit.

La première sera le contrôle policier  qui a finalement fusionné  récemment pour des raison d'économie et d'efficacité avec le contrôle judiciaire. Chargés de la protection du pays et de la défense de nos libertés, ils vérifieront l'authenticité de vos documents: passeports, cartes d'identité, certificats en tout genre. Ils s'inquièteront avec tact et mesure si vous n'êtes pas des évadés de prison en rupture de ban, en instance de divorce, si vous avez la garde de enfants, avez payé vos impôts, n'avez pas été condamnés par contumace à la prison à perpétuité, n'avez pas émis des chèques sans provision, n'avez pas l'intention de fomenter des attentats ou d'attenter à la pudeur. Cet interrogatoire au troisième degré se fera dans le respect de la convention de Genève et avec un professionnalisme qui exclut toute bavure. Deux interventions vous paraîtront sans doute un peu brutales. Ils éventreront vos valises à la recherche d'un double fond pouvant cacher des armes lourdes du genre stinger, mines anti-personnel, mitrailleuse lourde et ils investigueront sans doute votre arrière-train d'un doigt expert à la recherche de suppos pouvant receler de la cocaïne ou des documents  compromettants.

Sitôt libérés, vous serez dirigés vers le contrôle sanitaire. Il a été renforcé depuis les évènements que vous savez et exigera peut-être une hospitalisation de 24 heures dans une annexe très bien équipée et animée par une équipe que le monde entier nous envie. On vous demandera les attestations certifiant que vous avez été vaccinés depuis moins de trois mois contre la polio, le tétanos, la rage, le palu, la syphilis, la rougeole, la rubéole, la tuberculose, la diphtérie, avez reçu votre cinquième dose d'anti-Covid. On vous fera une prise de sang afin de vérifier que vous n'êtes pas dans la phase d'incubation d'une maladie contagieuse à potentialité mortelle, un test ADN pour vous exclure de la liste des 1000 individus les plus recherchés de la planète.

Il ne vous restera plus qu'à passer  le contrôle douanier. Ce n'est qu'une formalité rapidement expédiée. Il vous sera demandé de vider vos poches, vos valises, de passer une rectoscopie et vous gagnerez la porte de sortie après avoir franchi la haie de CRS qui la bloquera dans la peur d'une attaque de kamikazes venus de loin et désireux de faire sauter le terminal que vous venez de quitter. Ce contre-temps ne vous aura retardé que de 3 ou 4 heures  que vous ne regretterez pas, le TGV qui devait vous conduire quasiment à notre porte étant immobilisé grâce à une grève surprise des aiguilleurs de la SNCF qui voudraient bénéficier comme les sages-femmes de l'AP de congés de maternité.

Résorbée en 48 heurs, la grève ayant pris fin après que leurs revendication légitimes aient été satisfaites, vous  sonnerez à la grille  où vous serez attendus par nos fidèles gardiens, un couple de chiens loups croisés avec des bergers allemands. Affectueux avec ceux qui les nourrissent, ils peuvent être intimidants pour des étrangers à l'odeur inconnue. Ne soyez pas effrayés s'ils vous considèrent au premier abord comme des steaks saignant en état d'être dévorés. Nous détournerons leur attention en leur faisant prendre conscience de leur erreur avec une entrecôte pour deux. Pendant qu'ils seront occupés, vous pourrez entrer,  vous installer et vous préparer à savourer des vacances commencées sous d'aussi attrayants auspices.