Au fil des ans, la barbe
n'arrête pas de pousser, les cheveux de tomber. La raison en est simple et mon
étonnement est presque de l'inquiétude: comment pouvez-vous encore vous poser
la question?
Les poils du dessus de la tête sont les victimes directes de leur implantation au sommet du crane: leurs racines plongent dans la matière grise. Les bulbes pileux y sont soumis au bombardement permanent des idées et des pensées qui sont émises, mêmes par les idiots et les imbéciles, sur un mode continu. Avec le temps, les forces de défense du cheveu faiblissent, sa résistance a des limites. A bout, sapé à sa base par un ennemi qui, jamais, ne désarme, il finit par succomber ou déserter, par poignées. Les survivants se regroupent aux tempes. Certains qui croient les charlatans essaient des solutions miraculeuses: les lotions. D'autres, plus fortunés paient le prix fort à des mercenaires du cuir chevelu dans l'espoir de reconquérir les territoires perdus. Ils se font payer en francs suisses, sous le chapeau.
La barbe n'a pas ce problème, toujours fournie, jamais clairsemée, elle affiche fièrement son endurance au bout du menton, sur les bajoues. Drue ou soyeuse, elle ne craint que le feu du rasoir. Il lui mène la vie dure, mais elle ressort toujours victorieuse de ce duel à mort. Elle doit sa résistance au temps, à la lame, à sa place sur la face. Le terrain est fertile, sans arrière-pensées à lui opposer. Elle n'a comme vis-à-vis qu'une bouche avec une langue et des dents qui ne pensent qu'à mastiquer les bouchées. Elle est même contente que la barbe lui fasse un peu d'ombre, ce n'est finalement qu'un parasol bien commode.
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