« Le Créateur
a une lourde responsabilité dans le désarroi général qui prévaut depuis
toujours. N’en déplaise à ses thuriféraires fanatiques qui l’exonèrent de tous péchés,
je prends la liberté de lui remonter les bretelles, la coupe étant pleine. Je
n’ai pu retenir ma colère quand, hier dans l’après-midi, Tigre, mon chat,
ramena dans la cuisine, en passant par la chatière, la moitié d’une petite souris.
À le voir si fier, si content, si repus et ce qui restait d’elle, si petite, si
mignonne, si fragile, je me suis insurgé et si vertement que vous partagerez
mon indignation. Le responsable de cette tuerie, ce n’est pas Tigre, mais son
créateur, celui de toutes choses qui en a fait son bras armé. Plus grave car ce
n’est qu’un exemple entre les trillions qui, au même moment, sur la terre
entière, au fond des océans rejouent la même tragédie. Il faut le dire :
le Créateur est un serial killer. Il a construit le monde à son image. C’est
une vérité révélée. Il l’aurait même dit devant témoin. On connaît le résultat.
Je le soupçonne d’avoir une mentalité de polytechnicien. Plutôt que de faire
simple il a tout compliqué. D’un simple bidet il aurait fait une usine à gaz
toxique.
Avec un peu
de réflexion, de bonté, de sens commun, la terre serait vivable, mais le
Créateur a tout fait pour que le paradis soit un enfer.
Vous allez
dire, comme d’habitude, où est l’erreur ? Quelques exemples devraient
suffire à vous faire comprendre que ce n’était pas difficile.
Sa création
la plus dangereuse est, il l’a démontré depuis le début, l’homme. C’est une
créature diaboliquement malfaisante dans son ensemble (à part quelques
individus extraordinaires, des extra-terrestres : Michel-Ange, Vinci (le
Léonard), Mozart, Rembrandt, 2 ou 3 académiciens, vous, moi, quelques autres). L’arrivée
d’une concubine ne l’a pas beaucoup amélioré et parfois aggravé. Si, au lieu de
le diviser pour les fusionner de temps en temps pour assurer la descendance il
s’était contenté d’imiter ce qu’il avait très bien réussi peu de temps avant
avec l’escargot, on aurait évité bien des ennuis. Avec un humain hermaphrodite,
il faisait l’économie de la guerre des sexes. L’homme cadré par son côté
féminin tout de douceur, de compassion aurait perdu son instinct prédateur,
guerrier, qui fait de lui un être dangereux et un peu crétin. On n’aurait
jamais vu de dragonnades car finis les dragons pilleurs, violeurs, massacreurs.
Les dragonnes, avec leur mauvais caractère les auraient rapidement remis au
pas. Il y aurait peut-être eu, face à la tentation, une petite bataille
intérieure mais le côté dominateur de la moitié femelle ne leur laissait aucune
chance.
Le Créateur a
multiplié les mauvais choix :
Pourquoi un
tigre et un lion ? Le tigron reproducteur aurait suffi.
Il aurait pu
éviter de créer l’asticot et laisser pourrir les cadavres tranquillement sans
être bouffés de l’intérieur. Plus d’asticots, plus de mouches. Demandez aux Australiens
s’ils ne seraient pas contents dans un pays enfin vivable !
Pourquoi
cette hécatombe de pucerons par les coccinelles ? Il lui suffisait de
créer une puceronnelle végétarienne, spécialisée dans les mauvaises herbes. On
évitait les herbicides et les feuilles des arbres à noyau et surtout à pépins
dormaient tranquilles et entières.
Pour en
revenir à mon tigrito qui aime tant les mésanges et les petites souris des
champs, pourquoi pas un hybride croisé du chat et du chien ? Un gentil
animal de compagnie qui aboierait au dehors et miaulerait à l’intérieur, qui
aurait la fidélité du chien et la souplesse du chat, qui abandonnerait la
chasse aux innocentes et se contenterait de croquettes et d’un bon nonos le
dimanche pour s’agacer les dents ?
Avec un peu
d’imagination, de charité, de raison, le Créateur aurait pu faire l’impasse sur
les guerres, les hécatombes et pire encore ».
J’en
tire ma conclusion, gardez la vôtre, car le bonhomme serait irascible. Il a
fait ses preuves. Il vaut mieux ne pas s’en faire remarquer. Personnellement,
je ne suis pour rien dans ce libelle anti-Dieu. C’est un maître chanteur
anonyme à qui je ne peux rien refuser qui m’a obligé à l’écrire.
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