Pour vous faire regretter tout l’argent que vous avez
gaspillé pour gueuletonner le soir du réveillon avec des huîtres pas très
fraîches, d’escalopes de foie gras d’oie roumaine gavée aux boues d’épandage, d’un
chapon ukrainien coriace fourré de marrons véreux et, en apothéose, une bûche
picardesque made in China et rescapée d’un naufrage sous les tropiques, je vais
vous raconter ma façon de festoyer à domicile et pour pas cher.
Quand je veux me faire plaisir et m’offrir une grande bouffe,
je choisis le livre de cuisine d’un chef multi-étoilé et me prépare un beau
menu plein de plats infaisables, avec des ingrédients inconnus, fricotés dans
des préparations impossibles et aux prix imbattables.
Je me sers à domicile, bien calé dans mon fauteuil et je lis
les recettes à haute vois, avec l’intonation, détachant bien les mots, les
mâchonnant, en extrais le jus, la quintessence, les nuances. J’en saisis les mannes
et me ressers à volonté, autorisant le gourmet que je suis à être gourmand ce
jour-là. Étant plutôt dessert que fromage, je finis sur une belle pâtisserie ou
deux.
Je sacrifie mon eau du robinet et m’offre un
Château Yquem 47 en apéritif et un Pétrus 90 bien chambré. Je les assèche sans
remords ni gueule de bois, ma méthode permettant l’ad libidum sans limite.
Gavé, repus tout en étant léger et ayant l’esprit clair, je
m’autorise, en digestif, un petit en-cas : quelques grains de caviar sur
un blini arrosé d’un trait de vodka glacé suivi d’une sole fermière au beurre
de Guérande, déglacée au champagne millésimé et je termine par quelques macarons
fourrés de langues de chat et de crêpes dentelle.
Pour garder le souvenir des bordeaux premier cru, je baptise
le supplément à mon repas étoilé d’une volvic de l’année.
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