La glace en fondant subit une terrible épreuve. Elle perd,
avec sa température, sa consistance, sa couleur, sa splendeur. Elle se fissure,
se dégrade et finit, lamentable, en flaque.
Si c’est un cube qu’on arrache à la douce froideur du
freezer pour rafraîchir le whisky, elle prend la double peine. Sa pureté se
dissout dans le vice.
Son sort est aussi tragique si c’est un iceberg détaché du
glacier et tombé dans la mer. Il part à la dérive, tiré par les courants,
poussé par le vent. Miné par le Gulf Stream, tel un morceau de chocolat dans le
beurre et le micro-ondes, il se dissout dans son eau tiède et disparaît à
jamais. Il ne laisse aucun souvenir, lui qui avait mis des siècles à se
construire, hiver éternel après hiver éternel.
La glace de tous les glaciers coulera au fond des mers quand
les calories auront fini de gagner la guerre qu’elles ont lancée contre les
frigories. Alors les mauvais génies, prisonniers sous la carapace de glace qui
écrasait les pôles, seront libérés et on verra ce qu’on verra.
___________
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire